jeudi 7 avril 2016

Avalon sous greement de fortune.

Schlaaaaaaaaackkkk, ça c'est le bruit de la drisse de génois qui lâche !

Mardi 5 avril, une mauvaise journée qui commence par de la pluie, des nuages partout, du vent dans le nez, ....
Plus tard dans la soirée, vers 2h30 du matin, le 6 avril donc, qui est une sorte de 5 avril mais en plus sournois, schlaaaaaaaaackkkk. Un bruit que l'on devine immédiatement étranger aux bruits normaux d'un bateau. On lâche son bouquin et on file voir ce qui se passe dehors. Dans l'ordre :

  1. le bateau est arrêté alors qu'il doit y avoir entre 15 et 20 nœuds de vent, bizarre
  2. le pataras -- haubans qui retient le mât par derrière -- est tout flasque, stupeur
  3. le génois et son enrouleur sont complètement dans l'eau sur tribord, horreur
  4. "Pilou, debout, on a un problème !", réveil en douleur

Tout le monde sur le pont, le mât est toujours debout. Hourra intérieur. Sécurisation de notre si beau et indispensable mât en tendant la drisse -- corde qui passe dans le mât et qui permet de hisser une voile -- de spi. On ajoute même la balancine de tangon tant qu'on y est. On a vraiment pas envie de voir le mât partir à l'eau. Enfin, on remonte le génois et l'enrouleur à bord.

Brainstorming, cigarette de réflexion, on essaie de comprendre.

Dans une mer un peu courte -- casse bateau diraient certains -- mais tout à fait manœuvrable, avec un vent soutenu mais vraiment pas dantesque, deux ris pris dans la grand-voile et génois déroulé entièrement, nous avons "cassé" l'étai -- câble en inox qui relie le haut du mât à la proue et tient aussi
l'enrouleur de génois. Le bout de l'étai qui est normalement relié au mât est dans nos mains, nu, sans aucune "ferrure". Bizarre. Nous avons du mal à reconstituer le scénario catastrophe, nous comprenons juste que nous sommes à plus de 200 milles des côtes, notre réserve de gasoil n'est en aucun cas
suffisante pour rallier au moteur un abris, il va falloir jouer serrer avec un mât branlant.

Tout de suite, nous revient en tête l'épisode de Valparaiso, où un problème similaire avait déjà failli nous arriver. Mais depuis à chaque escale -- sans exception -- nous montons dans le mât pour vérifier l'accroche de cet étai et à Buenos-Aires, nous avons même changé les rondelles et la chaveta --
l'épingle -- qui sécurise le tout. Donc pas de remords à avoir de ce côté-là. Limite un petit soulagement, car je me rappelle la petite voie intérieure qui me disait à Buenos, alors qu'une première montée dans le mât m'avait laissé quelques doutes : "laisse donc ça tranquille, on changera ça à Rio de Janeiro, ça peut attendre, ..." Pour une fois, nous n'avons pas procrastiné, nous nous en félicitons.

Évidemment, c'est parfaitement ce gros moment de galère que choisit un cargo pour venir nous raser en pleine nuit sans lune alors que nous sommes hébétés sous le choc et non-manœuvrants... La bonne trouille de bout en bout. Nous sommes bien à bord, de toute façon la radio est éteinte et nous ne savons même pas si nous avons assez de courant pour communiquer. Pas de PAN PAN, pas de MAYDE MAYDE, juste quelques minutes sans respirer.

Le lendemain au réveil, nous faisons toujours route vers l'est en nous éloignant des côtes donc, mais Pilou a pris le temps de bien consulter la carte et nous décidons que notre point d'atterrissage sera Itajai et non plus Rio. Ça nous fait économiser près de 300 milles, ce qui sous gréement de fortune
est très très bon à prendre.

Nous virons donc très précautionneusement et faisons route au nord-ouest pour atteindre notre nouvel objectif. Nous hissons aussi notre voile tempête en guise de foc pour pouvoir mieux remonter au vent que sous grand-voile seule. Nous plions le génois, rangeons un petit peu le bateau, et essayons d'analyser l'enchaînement qui aurait pu aboutir à une chute pure et simple du mât...
Toujours pas de réponse, sauf que nous réalisons que l'étai n'est pas cassé mais qu'il est sorti de sa ferrure, il n'est plus serti dans sa ferrure. Malfaçon du gréeur du Crouesty qui nous a tout refait avant que nous partions ? Coup de pas de chance ?

Toujours est-il qu'actuellement, tout est sécurisé, nous sommes à 250 milles d'Itajai que nous espérons atteindre en fin de week-end ou lundi et qu'il va nous falloir trouver un gréeur pour refaire l'étai et réparer l'enrouleur. Le mât couine, grince, tremble, se secoue, secoue le bateau... chaque vague est un supplice, mais nos drisses semblent tenir le coup. Nous faisons route sous voilure très réduite, à vitesse très réduite.

Comme un pied de nez à ces arias, nous recommençons à rencontrer des poissons volants. Hauts les cœurs.

Pensons bien à vous,

LBB,
Pilou et Driou,

Position : 31°12'27"S 48°56'44"W
Vitesse : 4 nœuds
Cap : 0°
Vent : 8 nœuds du 250°
Météo : nuageux
Mer : qui se calme
Chemin parcouru : 519 milles
Chemin restant : 258 milles

PS : grosse pensée pour Papi "on répare et on se retrouve en Bretagne. Remets toi bien."

4 commentaires:

  1. Foutu étai!!! Courage les copains, accrochez vous, on pense bien à vous! Martin

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  2. Courage les amis ...prudence quand même ,le cap horn passé et vous voilà dans la difficulté ....la mer est imprévisible et le matériel aussi si je comprends bien .
    Je vous embrasse
    Chouchou

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  3. Nous aussi on pense à vous!!! Les Prevosteau 2.5

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  4. bon courage. patience et longueur de temps valent mieux que colère et rage (sic)..Tata

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